Mais pourquoi Dieu est-il allé dans cette galère? Pourquoi s’être embarqué sur un ce radeau où tout n’est que rapports de force, coups bas, faux-semblants et vrais disgrâces? Patrice Duhamel, grand manitou des programmes de France Télévisions et Mazarin de Patrick de Carolis, cet homme secret dont je veux vous dire ici deux mots, sera t-il un jour «Oscarisé» par un je ne sais quel Grand jury de la télévision, pour avoir tout essuyé, tout enduré, sans l’ombre apparente d’une simple grimace d‘agacement ?
Je me souviens du coup de fil qu’il m’avait passé un lundi, à l’été 2005, pour me dire toute sa joie de la nomination de son ami Patrick de Carolis à la présidence de France Télévisions. Il se voulait heureux pour lui : la griserie courtoise, polie et maîtrisée d’un homme qui avait estimé judicieux de renoncer, non sans une élégance qui allait de pair avec un brin de hauteur désabusée, à se présenter à ce poste. Au nom de l’amitié et parce qu’il considérait, à tord, à l’époque, que ses chances de victoire étaient maigres.
Il semblait heureux, mais je trouvai qu’il y avait eu chez lui, à cette époque, un manque de flair évident : une absence de vista qui l’avait conduit à rater le coche d’une présidence assurée. Et à accepter, à défaut de cette Terre promise, le poste, peu enviable, de grand chambellan d’une maison ingouvernable.
Trois ans ont passé et Duhamel n’a pas changé. Certes, à la qualité changeante de son regard et de ses silences, on sent parfois que l‘épreuve des mois passés à la tête de ce tanker mitraillé par l’Elysée, où Nicolas Sarkozy mène la danse, a laissé quelques traces. Mais quel roc ! Là où beaucoup seraient au bord du suicide, Patrice Duhamel affiche une sérénité déconcertante, qui tranche avec le climat de guérilla politique qui entoure une maison guettée par un séisme, assise sur un chaudron. Où règne depuis quelques mois une odeur de veille : à quand le « big One » ?
Duhamel n’est qu’un masque, en vérité. Le masque _ « Pokerface »_ de celui qui traîne depuis trop longtemps autour des tables du grand Casino médiatique pour qu’on la lui fasse. Grandi à l’école de Robert Hersant, du temps de La 5, dont il fut l’une des figures, passé par la case Serge Dassault, qu’il côtoya de près au Figaro Magazine, tantôt soutier, tantôt vedette, au sein d’un très grand nombre de médias, depuis près de 30 ans, Duhamel a tout appris de ce jeu. Pour s’être fait souvent décaver à ses débuts, notre homme a appris à faire siffler les cartes hors du sabot. A aller chercher des jetons sous la table. Et à débusquer les joueurs à la petite semaine, en évitant les chausses-trappes de parties truquées.
On l’a souvent dépeint « indécis », « hésitant», « louvoyant », et il est tout le contraire: cet homme, dont le second prénom n’est pas Carpette, sait dire non. Un patron des programmes de France Télévisions emmené vers le précipice, en compagnie de son compagnon de mauvaise fortune, c’est aussi capable de résister. Aux pressions politiques, aux exigences d’animateurs capricieux, aux jérémiades de producteurs qui font le pied de grue à la porte de son bureau. Et j’avoue, qu’en l’espèce, Duhamel fait un joli spécimen.

Bien faire et laissez dire, telle pourrait être la devise de celui qu’un Nicolas Sarkozy semble respecter, me dit-on, malgré quelques solides empoignades et embardées. Pour sa capacité à ravaler ses colères, pour son flegme et sa propension à passer, intelligemment, sur les humiliations. Et pour sa capacité, enfin, à instaurer de vrais rapports de force. Mais que c’est dur !
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mai 22, 2008
C’est vrai que Patrice Duhamel fait un travail absolument remarquable, et que malgré les nombreux problème auquel il a du faire face il est toujours resté le maître de la situation.