Mon ami Daniel Renouf, président de System Tv, ancien membre de la commission Campet (sur la réforme du service public, en 1993), ancien président de la Fédération Française des Agences de Presse, m’a fait parvenir un « Rebond » paru dans « Libé » le 4 juin 2008. Avant l’heure, et avant tous, Daniel Renouf a sonné le tocsin contre cette « énième » réforme de l’audiovisuel public, improvisée, inutile, sans stratégie de programmes ni d’entreprise, mettant la charrue avant les bœufs, et qui sur des présupposés plus idéologiques que factuels (être financé en partie par la publicité empêcherait une offre diversifiée de programmes de qualité) « mettra le service public de télévision dans une dépendance totale vis-à-vis de l’administration et du pouvoir politique ».
Daniel Renouf sait de quoi il parle : le public, c’est son métier. Et il est un des rares professionnels à avoir fait sédition d’entrée de jeu en livrant tout haut des évidences du métier. Par exemple qu’on ne vend pas le même documentaire, la même fiction à TF1 ou à une chaîne publique, que les grilles sont différentes. Ou que s’il n’y avait eu la politique ambitieuse de France 3, il n’y aurait pas un dessin animé français. Hélas, soyons francs, ceux qui dénoncent le plus vigoureusement l’alignement des chaînes publiques sur le modèle TF1 parlent de ce qu’ils n’ont pas vu, vu qu’ils regardent très peu la télé, et en méprisent les programmes les plus populaires.
Pour ne pas irriter ceux qui détiennent les cordons de la bourse, trop de producteurs et professionnels ont fermé leur clapet. Il faut dire qu’un producteur en France est un être fragile ; il est totalement dépendant d’une poignée de chaînes, qui paient au plus juste ; dépendant encore de liens de connivence, politique ou autre ; et dépendant de l’Etat. La plupart de nos sociétés de production sont sous capitalisées, d’équilibre précaire (notamment dans le secteur documentaire). Les seules enseignes prospères, comme Endemol et Fremantle, rois du flux formaté (jeux et téléréalité), battent sous pavillon étranger. Conséquence : la production en France est sous développée, elle n’exporte pas, ne rayonne pas.
Nous sommes en 2009, et les professionnels s’agitent. Voilà ce que j’entends: « Les guichets de France 2 et 3 sont fermés, plus personne ne veut prendre de décision, des projets ont été arrêtés, on nous répond qu’il n’y a pas d’argent » Tristes tropiques : ce régime maigre ne symbolise t-il pas ce qu’est devenue l’économie de l’audiovisuel public depuis le 5 janvier : appauvrie, et dépendante.
Le pire, au vu de la nouvelle grille, c’est le sentiment que le but ultime de la réforme Sarkozy aura été de faire avancer l’horaire des programmes de quinze minutes, pour la France des couche tôt.
Philippe Gavi
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février 8, 2011
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