20 ans…Le CSA fête ses 20 ans, sur fond de critiques et de soupçons de connivences avec le pouvoir. Des charges un peu rudes à mon goût pour une institution qui accomplit, par ailleurs, mille missions et taches diverses: de la régulation du marché de la radio à l’organisation de la TNT, en passant par l’observation des règles, (contestées et contestables), sur le pluralisme.
Je lisais ce matin dans Libération les déclarations d’un ancien membre du CSA, Joseph Daniel critiquant « l’attitude louangeuse» du président du CSA, Michel Boyon, à l’égard de la politique audiovisuelle de Nicolas Sarkozy. Le vieil observateur du Paf que je suis se souvient des partis-pris idéologiques de ce fidèle de Laurent Fabius qui n’aura pas laissé au CSA le souvenir d’un membre véritablement indépendant, à l’image de son mentor, un modèle d’interventionnisme et de sectarisme, deux travers que Fabius avait chevillé au corps quand il était à Matignon…Que chacun balaye donc devant sa porte.
Le problème dans ce pays, c’est que l’on est incapable d’installer des autorités totalement déconnectées du pouvoir politique. Il n’est pas un président du CSA, de la CNCL ou de la Haute Autorité, qui n’ait pas été tenu la bride courte par le président de la République en place: de Mitterrand à Chirac, jusqu’à Sarkozy. C’est ainsi une tradition détestable. Certains ont parfois résisté, à l’image de l’ancienne présidente de la Haute Autorité, Michèle Cotta, renâclant devant les oukases du monarque Mitterrand, d’autres ont plié l’échine, avec docilité.
Même le Conseil Constitutionnel, sorte de Roche de Solutré de la République, n’échappe pas au soupçon : l’examen de certains des articles de la loi sur l’audiovisuel, versus Sarkozy, par Jean-Louis Debré, Jacques Chirac et Valéry Giscard d’Estaing, promet ainsi de se révéler très cocasse…
Alors, Boyon ? Ce grand commis de l’Etat, drôle, je vous l’assure et brillant, c’est une certitude, a sans doute eu le tord de trop en faire, à propos de la réforme Sarkozy, saluée à grands renforts de cymbales. Mais on pourrait estimer, également, qu’ayant oublié un indispensable droit de réserve lié à sa fonction, Boyon ait eu tout simplement envie d’exprimer une opinion très personnelle…soyons tolérant.
Et le voilà aujourd’hui à la tête d’un cénacle, dont Nicolas Sarkozy a allègrement raboté les attributions, en le privant de la nomination, hautement symbolique, des PDG de chaînes publiques. Cette amputation est assez mal digérée au CSA où l’élection des patrons de télés et de la radio publique était jusqu’alors l’un des hochets du Conseil, un moment clé de sa vie. Seul Michel Boyon, qui a décidé de faire bonne figure, semble, ou feint, d’en avoir fait son deuil, en promettant à qui veut l’entendre, notamment dans le Figaro de ce jour, une vigilance de chaque instant, puisque le CSA sera consulté en bout de chaîne sur les choix du chef de l’Etat. On jugera donc sur pièces…
Car, là aussi, regardons dans le rétroviseur. Pour avoir suivi, depuis 1982, l’ensemble des décisions prises, en matière de nominations, par les trois instances de régulation qui se sont succédées dans ce pays, je peux témoigner de l’absolue opacité et des manœuvres, petites et grandes, qui ont régies, en plus de 25 ans, des processus de nominations farcies de combines à la petite semaine, contaminées par la politique.
Et c’est à l’aune de ce bilan peu flatteur pour le paysage audiovisuel qu’il faudra donc juger les nominations de Nicolas Sarkozy, lequel peut nous réserver des surprises. Et il y en aura. Souhaitons seulement que Michel Boyon et le CSA aient le courage de se rebiffer, et de donner de la voix, si d’aventure Nicolas Sarkozy décidait, à son tour, de mélanger cuisine politique et nominations.
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février 3, 2009
devoir de réserve et non droit de réserve