ImmediaS

Mon petit coup de sang matinal…Je suis  tombé de ma chaise en écoutant Jean-François Copé qui était ce matin l’invité politique de France 2. Revenant sur le dérapage de Brice Hortefeux, le patron du groupe UMP à l’Assemblée a considéré le plus doctement du monde que cet incident devait tous nous conduire à une seule et même conclusion: la nécessaire régulation d’Internet, un vecteur considéré par Copé, non seulement comme le seul responsable de cet incident, mais également comme un vrai « danger pour la démocratie ». Internet, voilà donc le coupable. Et Copé d’en appeler à sa mise au pas. Oubliée la sortie d’Hortefeux, zappés les propos de comptoir du ministre de l’Intérieur, que Copé s’est empressé de dédouaner d’une phrase,  les vrais responsables ce sont vous et moi, pauvres internautes assez cons pour n’être pas en mesure d’analyser et de comprendre ce que la Toile nous répercute. Internet, cet œil qui vient fouiner partout, qui s’immisce là où ne l’attend pas, qui jette en pâture à l’opinion des images que nous ne sommes pas capables, à l’inverse des politiques, de décrypter, de  mettre en perspective, de « contextualiser », ces images qu’il faudrait du coup empêcher de nuire, censurer, au nom d’un impératif: la survie de nos démocraties.

Ah, un bon huis clos, une société  médiatiquement verrouillée, une Toile bien cadenassée avec des images choisies, triées sur le volet, comme à Pékin ou Cuba…Pauvre Hortefeux, jeté aux chiens parce qu’Internet est venu jouer les caisses de résonances, quand ailleurs dans le monde ou en d’autres temps, notre ministre aurait pu allègrement continuer sur sa lancée sans que la moindre bribe ne puisse être répercutée par des journalistes malveillants ! Si le monde change monsieur Copé, si les régimes les plus totalitaires de la planète se craquellent, si certaines atteintes à la liberté d’expression sont aujourd’hui révélées, dénoncées, dans le monde entier et si les opinions publiques s’émancipent et peuvent aujourd’hui jouer les contres-pouvoir, c’est parce qu’une fenêtre s’est ouverte. Et celle-ci s’appelle Internet.

Vouloir réguler un monde où les convergences technologiques sont en train de modifier la face de nos sociétés est tout simplement absurde: liberté, mobilité, initiative, participation, jeunesse, confiance, ouverture, réactivité, contre-pouvoir, mondialisation, c’est tout cela Internet. Trois mots pour Dominique Wolton résument cette révolution: vitesse-liberté-interactivité.  Et il est évident que ces trois seuls mots sont synonymes de tord-boyau pour un ministre pris au piège, comme pour les élus de la Nation. Il ne s’agit plus de jouer avec les mots, de dire tout et son contraire, de fustiger les médias, quand ils dérangent et de les cajoler quand ça arrange. Il s’agit d’être raccord avec ses convictions, d’être fidèle  à ses engagements et cohérent avec soi-même.  Internet n’est pas Orwell: c’est le nouveau poumon de la planète, avec ses miracles et ses excès. Il s’agit, pour vous, monsieur Copé, de vous y adapter et de faire en sorte que chacune de vos ouailles instille tout simplement un peu d’éthique dans sa pratique politique. Et que chacun accepte au sein du gouvernement, comme au Parlement, que celles et ceux qui vous ont installé puissent vous regarder et vous juger. Oui, les médias doivent tout dire et tout montrer. Ca s’appelle la démocratie.