La vente du quotidien La Tribune, pour 1 euro symbolique, par Alain Weill, propriétaire de RMC et BFM TV, est une nouvelle à la fois triste et décourageante. Racheté à grands roulementc de tambours en octobre 2008 par cet industriel des médias, couramment dépeint comme pugnace et inventif, ce journal devait aller «challenger» Les Echos. On allait voir ce qu’on allait voir…
L’opération, à l’époque, était d’autant plus alléchante pour son repreneur, que Bernard Arnault, le « vendeur », l’avait tout bonnement offert à Alain Weill sur un plateau d’argent: désireux de s’en séparer au plus vite, le patron de LVMH l’avait tout simplement céder gratos, accompagnant son geste d’une dote de 47 millions d’eurosQue d’empressement et de générosité de la part d’un chef d’entreprise milliardaire, qui n’a jamais eu la réputation d’uni philanthrope ! Alain Weill aurait du se méfier. Enthousiaste pourtant, le nouveau propriétaire promettait un avenir radieux, convaincu que moyennant une restructuration intelligente et un nouveau modèle économique, La Tribune retrouverait vite le chemin des bénéfices et de la croissance.
Patatras, moins de deux ans après une relance tonitruante, voilà qu’Alain Weill jete l’éponge, (même s’il refuse le terme), refilant ce journal à Valérie Decamp, une jeune femme venue de la pub qui a fait ses classes au sein du quotidien gratuit Métro et dont les premiers mots m’ont fait un peu frémir: « il s’agit de faire de La Tribune la marque économique de demain » a t-elle lancé sans un gramme de nuances…Gestionnaire méticuleux, Alain Weill, que j‘ai eu hier au téléphone, explique ses raisons de manière plutôt confuse. L’intéressé auquel je disais mes doutes, quant à l’avenir ce titre ballotté depuis de longues années et ma colère face à des entrepreneurs de sa trempe qui ne devraient pas promettre des lendemains radieux à des équipes que l‘on plante deux ans plus tard, m’expliquait que La Tribune avait en vérité un bel avenir devant elle. Pour peu que son nouveau propriétaire lui trouve un modèle économique viable. Pour peu que la crise du marché publicitaire fasse une pause. Ce dont Alain Weill ne semblait pas douter, indiquant que les pertes de ce journal avaient été fortement réduites et que ses ventes progressaient.
Un journal néanmoins fragile : La Tribune a enregistré des pertes de 7,9 millions d’euros, pour sa version imprimée, en 2009, contre un manque d’autres pertes, de 7,5 millions, en 2008. Et le quotidien compte économiser 6,5 millions d’euros en 2010, après avoir supprimé sa parution en kiosque le samedi et en revenant au format tabloïd. Pas simple…
Une bonne affaire en puissance, pourtant, à entendre son ancien patron, qui a jugé urgent de s’en délester! Allez comprendre…A cela, Weill réplique qu’à la tête d’un groupe pluri-média, il n’avait pas le temps d’être omniprésent aux commandes d’un titre, qui réclame un patron à temps plein. Soit.
Il est tout de même désolant d’assister à un tel gâchis. Car au-delà des discours de façade et de l’évidente bonne volonté d’Alain Weill, hier, et de Valérie Decamp, demain, on voit bien que l’avenir d’un quotidien de ce type, plongé dans un environnement fragile, est précaire. Et qu’il est inutile de se gargariser de mots inutiles: le seul modèle économique existant pour faire vivre la presse écrite, qu’elle soit faite de papier ou de contenus numérisés, s’appele la bonne vieille publicité : il y en a de moins en moins. Et les relais de croissance de la presse sont pour l’heure balbutiants : il n’est de voir les très faibles recettes engrangées par les sites internet adossés aux quotdiens et magazines : malgré des audiences conséaquentes et exponentielles, les dividendes restent très décevants et les perspectives n‘ont rien d’enthousiasmantes, à court terme.
Quant à la monétisation des contenus, là aussi prudence: l’expérience de Médiapart et de quelques autres sites d’information en ligne montrent bien qu’abreuvés à plus soif, les consommateurs ne sont pas disposés à payer massivement une information qui leur est gratuitement dispensée sur des milliers de supports alternatifs.
Donc, la Tribune. Ce quotidien, à qui l’on souhaite sincèrement bonne route, va devoir repenser son modèle pour espérer durer. Mais quel est-il? Doit-on faire basculer ce titre tout ou partie sur la Toile ? Mais là aussi, avec quels espoirs de recettes? Peut-on imaginer pourtant que La Tribune reste en l’état sur un marché qui voit même ce mastodonte qu’est le quotidien Les Echos subir la crise de plein fouet? En sautant du train, sans laisser de manuels de fonctionnement, Alain Weill a, sans le vouloir, tiré le signal d’alarme. Et remis sur la table des questions auxquelles aucun patron de presse n’a encore trouvé de réponses. Ici en France, comme ailleurs dans le monde.
mai 21, 2010
S’il est clair qu’il s’agit d’une grande déception, M. Alain Weill qui a fait ses preuves dans les médias (NRJ, RMC et BFM TV) est un gestionnaire avisé.
S’il estime ne pas être en mesure de relever le défi à ce stade, c’est qu’il a raison.
Il serait d’une mauvaise foi crapuleuse d’exonérer de leur responsabilité, nombre de banques et de groupes financiers en raison de la fameuse « crise » actuelle et de refuser ce motif pour un tel professionnel.
Les attaques contre Weill sont bien sûr motivées par la jalousie et la crainte de voir un vrai indépendant des pouvoirs, réussir.
Renaud Revel est très bien placé pour savoir que la presse « papier » est dans une situation quasi inextricable car elle s’est refusée depuis le milieu des années 1995, à s’investir sur Internet (l’Express s’y est converti bien tard aussi, hélas).
Aucun secteur d’activité ne peut rivaliser avec le « gratuit » (hors abonnements aux FAI !) que représente le Web. Ce modèle d’accès libre et immédiat va rester pour très longtemps, une valeur primordiale.
Weill est réaliste et réagit le plus vite possible. De plus, pourquoi ne pas accorder à son successeur (au féminin), un minimum de chances pour réussir ?
Cordialement.
mai 21, 2010
C’est une mauvaise nouvelle ?
Probablement pas pour Alain Weill. Il est un homme qui a du flair. Peut-être pense-t-il que l’échec est plutôt à venir.
Je ne sais pas mais, il a peut-être raison.
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février 8, 2011
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mars 20, 2014
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