ImmediaS

Qu’est-ce qui est pire ? Etre un proche de Sarkozy, forcément à ses bottes, ou être un journaliste sportif , forcément la tête creuse comme un ballon de foot ?

 J’ai lu avec intérêt l’excellent dossier du Mag de « Libé » sur « Sarkozy et les médias ». Un article me trouble toutefois, sur la nomination vendredi de Pierre Sled au poste de conseiller pour les programmes de France 3. Il est titré « Pierre Sled, un conseil d’ami ».  Surtitre: « Le journaliste sportif et proche de Sarkozy a été parachuté vendredi à France 3. »  Que les signataires s’émeuvent de la proximité du parachuté avec Sarkozy est naturel. « Chacun, lis-je, savait que la nomination de Pierre Sled serait le signe de l’allégeance de Rémy Pfimlin à Nicolas Sarkozy qui, depuis 2005, réclamait à cor et à cri une place pour son copain sur le service public ». Soit. Mais, sur le journaliste sportif, où est le problème ? Je lis ça: « Certains raillent l’arrivée d’un « prof de gym » aux programmes de France 3 (Pierre Sled a un Capes  d’éducation physique et sportive),  mais il est vrai qu’on voit mal ses dispositions pour réfléchir aux programmes de France 3 ».

Je n’aime pas ergoter (ou peut-être que si) mais la phrase mérite d’être dépiautée. Arrêtons-nous sur le  « mais il est vrai ». « Libé », qui, à ses origines, voulait donner la parole au peuple, et qui a compté dans sa matrice des jeunes ouvriers qui devinrent de grands journalistes sportifs (je pense à Jean-Pierre Delacroix) ne peut pas déprécier les profs de gym. Les signataires (le couple R.G. et I.R.) mettent donc aux guillemets de rigueur les propos incorrects de ces  « certains », non nommés mais cités. D’où ce « mais »,  d’autant plus hypocrite que le jugement qui suit donne raison aux railleurs : « mais il est « VRAI » (de quelle vérité s’agit-il ? Qui authentifie ?) qu’ «ON » (je suppose que c’est R.G. et I.R.) voit « MAL »  (un euphémisme déplacé dans un journal qui voit toujours clair) ses « DISPOSITIONS »  (comme disent les éducateurs) pour « REFLECHIR » (il n’a rien dans le ciboulot) aux programmes de France 3. » 

Je ne connais pas Pierre Sled. (photo) Peut-être n’a t-il pas la stature requise, je n’en sais rien. Mais les arguments invoqués pour le disqualifier sont faux et arrogants. D’abord, cette fixation élitiste sur le titre, le diplôme, comme s’il fallait sortir des grandes écoles pour prétendre réfléchir et conseiller. Ensuite, ce mépris pour le sport, le journaliste sportif, et plus largement le journalisme populaire. Je ne vois pas pourquoi le fait que cet homme de 52 ans ait réalisé la majorité de sa carrière dans le sport (Canal + et France 2), le divertissement, l’humour en ferait à priori un crétin incapable de réfléchir à ces choses sérieuses que sont les programmes de France 3. « On lui prête aussi un certain talent de guitariste (notamment sur Hotel California d’Eagles) mais bon. », persiflent R.G. et I.R. Mais bon quoi ? Est-il insensé de faire appel à un spécialiste des programmes sportifs pour travailler sur le « chantier » d’une chaîne publique qui se veut de qualité et populaire ?

Il  est peut-être naïf mais non irraisonnable de penser que le président de France Télévisons n’aurait pas cédé à la pression de celui qui l’a nommé s’il avait jugé que Pierre Sled n’avait pas les bonnes dispositions. Il n’est pas non plus aberrant de penser que Nicolas Sarkozy croit que l’ami a toutes les qualités qu’il faut.

Je m’indigne comme mes confrères des interventions incessantes de Nicolas Sarkozy. Pour autant, ce n’est pas parce qu’on est un ami, un proche, un protégé du Président qu’on est forcément incompétent, ni disposé à être à sa botte. PG