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Rencontre avec Claude Perdriel: le virevoltant "papyvore" et fondateur du Nouvel Obs qui veut s'offrir Libé

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Le secret avait été bien gardé et la surprise totale. Rassemblés au deuxième étage de la Tour Eiffel, une centaine de journalistes – tous de   vieux briscards – attendaient «Claude». Pas un ne manquait à l’appel. Tous avaient participé à l’aventure du Matin de Paris : ce quotidien disparu en 1987 que celui qu’on attendait avait fondé et dont on célébrait, ce jour de mars 2007, le 30e anniversaire de la création.

L’homme sortit de l’ascenseur au bras de sa jeune épouse, Bénédicte. Petite silhouette à la démarche hésitante et au regard vif et noir, son grand front est barré d’une mèche indocile. Son nez, chaussé d’épaisses lunettes à larges montures, lui donne l’allure d’un professeur Nimbus. Emu aux larmes face à l’attroupement, le patron de presse marqua un temps d’arrêt. Puis, ravalant l’émotion qui le submergeait, prononça ces quelques mots: «La famille a été dispersée par la vie et par la crise, mais elle existe toujours».

La famille? Une tribu de journalistes, passés tantôt par l’Express, Le Point ou France Soir, tantôt par le Quotidien de Paris, l’Aurore ou l’Evènement du Jeudi. Une diaspora dont le seul point commun est d’avoir eu un jour pour patron, Claude Perdriel. Figure de la presse française, fondateur du Nouvel Observateur et industriel véloce, cet homme de presse peu commun, que l’on pensait sur le déclin, à 84 ans passés, que l‘on pensait rassasié au terme d’un demi-siècle d’une carrière virevoltante, annonçait le 3 décembre son intention de rapprocher capitalistiquement son hebdomadaire du quotidien Libération : un rebond d’autant plus inattendu qu’on disait Perdriel au tapis, défait après qu’il ait essuyé cet été un fâcheux revers, avec l’échec dans sa tentative de rachat du Monde, face au trio d’investisseurs Bergé-Niel-Pigasse, qui en avait fait qu’une bouchée. Il en rêvait pourtant, «comme un gamin, comme un jeune loup, dont j’ai vu les yeux briller», raconte Hervé Chabalier, le patron de l’agence Capa et l’un de ses vieux fidèles. Au point de songer à hypothéquer son hôtel particulier parisien et à vendre sa maison en Toscane, pour s’offrir ce titre…

«Perdro», -ainsi surnommé, de tout temps -, fut d’abord un jeune homme de bonne famille. Amoureux de jazz et brillant polytechnicien, il fréquenta la même classe que Serge Dassault. Il fut ensuite, à 30 ans, un dandy capricieux et inconstant, -«qui changeait de voiture comme de chemise et ne gardait pas plus de trois mois la même petite amie», commente l’un de ses compagnons de route. Un homme de goût aux pulls en cachemire légendaires, couleur flashies, dont le trait de caractère principal est la fidélité. Ce n’est pas un hasard, ainsi, s’il s’en est allé chercher l’une de ses ouailles, Laurent Joffrin, un ancien de «l’Obs» et directeur de Libération, pour organiser les noces entre son journal et celui fondé par Serge July. Pourquoi ce dessein? «Par amour du papier», disait-il cet été, quand il esquissait son projet. «Que voulez-vous, j’aime trop les journaux», poursuivait l’intéressé. Il n’a pas 20 ans quand, élève à Polytechnique, il décide de réaliser, dans le cadre de travaux imposés, une édition de France Soir et une autre de Combat, dont il remplit seul les colonnes. Si bien qu’à 24 ans, Claude Perdriel lance son premier journal, Le Cahier des saisons, une revue littéraire haut de gamme. Ingénieur à la Compagnie Électromécanique, il va apprendre parallèlement le métier du traitement d’eau. «Une autre  passion » qui le voit, en 1957, s’installer à son compte, à la tête de SFA, une société qui a fait sa fortune en développant une technique de pointe d’assainissement d’eaux, baptisée Sanibroyeur. «Ayant un besoin d’argent pour financer mes journaux, j’ai du développer à marche forcée ma PME. En d’autres termes, la presse m’a rendu d’une certaine façon relativement riche, par nécessité».

C’est fort de ses premières royalties qu’il devient, en 1960, actionnaire et membre du Comité directeur de France Observateur et qu’il décide de créer, en 1964, aux côtés d‘une équipe rassemblée autour de Jean Daniel, Le Nouvel Observateur. Géomètre et patron de presse : «C’est le  même métier » dit-il. «Une cellule de recherche et d’innovation au sein d’une entreprise ressemble à une rédaction. Tous partagent la même quête: celle d’une vérité qu’ils n’atteignent jamais». Il arrive pourtant que l’ingénieur l’emporte sur le journaliste:  aux prémices de la création du Nouvel Obs’, Bernard Villeneuve, qui fut son bras droit au Matin de Paris et son plus proche confident, encore aujourd’hui, se souvient avoir vu Claude Perdriel trouver seul, face à une armée de techniciens désemparés, la solution à un problème que soulevait le mécanisme d’une imprimerie high tech. Beaucoup l’ont vu ainsi passer des heures, encore récemment, à étudier fiévreusement des courbes de résistance aux matériaux dans ses bureaux d’étude. Avant de se plonger avec la même gourmandise dans la politique de couverture de son journal, dont il n’est pas satisfait et pour laquelle il est allé demander conseil dernièrement à un autre baron du métier, l’ancien fondateur de l’Evènement du Jeudi, Jean-François Kahn. « Péguy, dont je suis un disciple, expliquait que sa mère, bien que simple  rempailleuse de chaises, était la meilleure qui soit. Je ne suis pas rempailleur, mais lorsque je fais quelque chose, je le fais de mon mieux ».

Quitte à utiliser des méthodes de flibustier: Claude Perdriel ne s’est jamais vanté d’avoir amassé un joli magot, au milieu des années 80, en allant braconner sur le marché du Minitel rose, dont il fut l’un des pionniers! Funambule devant l‘éternel, la 180e fortune de France a passé sa vie à jongler avec les millions de son entreprise et à s’arranger avec les chiffres de vente de son hebdo, afin de maintenir son groupe de presse à flot. Et SFA, qui dégage chaque année entre 15 et 20  millions d’euros de dividendes, lui permet surtout de poursuivre ses rêves. «Je laisse tout dans la société, dit-il. Avec 1 million d’euros par an, je vis bien, très bien même. Et tout ce que je gagne par ailleurs est réinvesti». Toujours entre deux voyages d’affaires, l’industriel passe sa vie en jet. Il était en Chine à la mi-juin, mais à New York, deux jours plus tard, parti écouter du jazz. Pour tenir le rythme, Claude Perdriel s’impose une discipline de fer. Dur avec lui-même, il mange peu, mais des œufs en quantité -«la plus grande charge énergétique dans le minium de place», dit-il d’un ton docte-, nage deux heures par jour et joue au tennis: «Un chien absolu sur un court», confie l’un de ses partenaires.

Pour le reste, le patron de l’Obs vit en dehors du monde et au milieu des siens. Il ne fréquence ni l’establishment, ni les cénacles: «Je dois être la seule personne admise au Siècle qui n’y ai jamais mis les pieds», commente celui qui se dit profondément de gauche, -«celle du cœur»-, et  mendesiste de la première heure. L’homme qui se défie des politiques fut pourtant à deux doigts de suivre  François Mitterrand en 1981, dont il avait été le responsable de la campagne, lors de la présidentielle de 1974. Il préférera lancer le Matin de Paris: un quotidien mis au service de l’ancien Président qui le lâchera en 1987, après que Le Matin se soit rapproché de la nouvelle gauche, incarnée par Jacques Delors et Michel Rocard. Jamais pardonné, cet écart verra l’Elysée favoriser la création de Libération, dont le lancement va entraîner la chute du Matin de Paris. Un déchirement.  «J’avais pour Mitterrand une profonde admiration, mais du jour où le Matin a défendu des positions qu’il n’acceptait pas, je n’ai plus jamais été invité au Château».

Mais l’homme n’en a conservé aucune amertume: «J’ai fais mien ce précepte de Charles de Foucauld, «Il faut juger les gens, non pas sur leurs prises de positions, mais sur leurs trajectoires» «Claude, qui a une capacité à ne rien oublier, -les trahisons, comme les faux pas-, peut tout pardonner», poursuit Hervé Chabalier» Et même bénir certaines défections : le départ, fin novembre de celui à qui il avait confié les clés de l’Obs, Denis Olivennes, (photo), et qu’une partie de la rédaction rejetait, fut au fond un soulagement: la greffe n’avait pas pris, question d’ADN…

Celui qu’on vit au soir de la création du Matin de Paris distribuer lui-même le premier numéro de son « bébé», comme l’on donne l’hostie, s’enorgueillit ainsi d’avoir entraîné derrière lui plusieurs générations. On l’a même vu embaucher plusieurs fois certains  collaborateurs: ses «brebis égarées », à l’image de l’un de ses chroniqueurs vedette, Bernard Franck. En fait, Perdriel déteste qu’on le quitte: il a vécu le départ de Laurent Joffrin pour Libération comme un veuvage et celui de Bernard Villeneuve, pour les Echos, comme du dépit amoureux: «Une rupture qui m’a valu 6 mois de silence», confie ce dernier. Si bien que rien n’a bougé à l’Obs: comme au Vatican, le temps s’y est figé et les cardinaux y coulent des heures tranquilles. Les secrétaires et les coursiers sont les mêmes depuis 30 ans: «Tant que Claude est là, tout va bien pour nous», souligne l’un d’eux. «Le respect des petits et l’élégance d’un seigneur», achève Bernard Villeneuve: «les rares fois où il s’est résigné à se séparer de quelqu’un, c’est à moi qu’il confiait le soin d’opérer: «en douceur», me disait-il. «J’y passais des heures ». «Pour n’avoir pas à licencier dans mon journal, je fais comme dans mon entreprise: je déniche de nouveaux marchés et développe de nouveaux produits».

Aujourd’hui, c’est le numérique qui l’agite. «Je fourmille  d’idées. Et en homme pressé, veux aller vite!». Il y a 20 ans, le Minitel, aujourd’hui la Toile: « Je ne veux pas perdre la main » dit-il.

NB: cet article est également publié cette semaine dans les colonnes de l’Express.

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1 Comment
  • horoscope traits
    février 7, 2011

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