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France-Soir au cimetière des éléphants d’une presse sacrifiée.

par
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La mort d’un journal est un évènement à part, la disparition d’une entreprise de presse, un épisode si particulier qui va bien au delà des simples dégâts humains qu’elle provoque. Si bien qu’il est impossible de le comparer à la destruction d’une quelconque entreprise. Car un journal reste une communauté, une  famille d’un même ADN, aux liens consanguins, qui voit ses membres cohabiter avec le sentiment de partager une aventure unique et fragile.

On ne quitte pas une rédaction le soir venu sans en emporter avec soi une partie de sa journée, sachant qu’il faudra se réinventer le lendemain. Un jour chasse l’autre. Aussi quand un journal s’arrête et met la clé sous la porte, c’est toute une collectivité qui s’effondre et se disloque. C’est ainsi que Paris a ses chapelles et ses cénacles. On ne compte plus les journalistes ayant participé à des aventures de presse et que des souvenirs et des batailles communes continuent de rapprocher des années après, comme autant d’anciens compagnons de route. Il y a les anciens de l’Aurore, les anciens  de Libération, (période Serge July), les héritiers d’Actuel ou du Quotidien de Paris de Philippe Tesson, les anciens compagnons de fortune des Nouvelles Littéraires ou la petite troupe disséminée de ceux qui composèrent la rédaction du Matin de Paris. Dont je fus.

Si l’on parle aujourd’hui de France-Soir en évoquant le plus beau titre qu’ait connu la presse française d’après-guerre, que dire de ce quotidien fondé par Claude Perdriel en 1979 ! On y entrait comme en religion, avec le sentiment de franchir le seuil d’une cathédrale, une nef dont le vicaire était un seigneur. Ce furent 9 années de bonheur au sein d’une rédaction qui finira dans le bas-côté, en 1988, après que Claude Perdriel ait lâché la barre et que ses successeurs se soient montrés incapables d’assurer la relève. La mort du Matin de Paris ressemble à s’y méprendre à celle de France-Soir, aujourd’hui. Même succession d’actionnaires fantasques et incapables de visions claires, même réduction des moyens et de la voilure, au fil des années, même stérilité dans l’initiative, même méconnaissance d’une métier qui reste, au-delà de la technique et des évolutions de ce métier, soumis à la dictature de l’urgence, instituée par Internet, l’affaire de façonniers : l’affaire de journalistes.

Les derniers mois du Matin de Paris furent un calvaire qui vit un dernier carré de journalistes exsangues courir Paris à la recherche d’un mécène et arpenter les studios de télé et de radios, dans le but de sensibiliser des confrères qui nous avaient enterrés, la mine confite. Le dépôt de bilan fut un déchirement et l’ANPE, l’ultime sanction.

J’entends depuis ce matin les commentaires à rallonge autour de la disparition de France-Soir et suis un peu abasourdi par les raccourcis: A les écouter, Internet serait ainsi le tout premier responsable de la chute de ce quotidien dévoré par la toile. C’est une contre-vérité. A l’image de l’ensemble de la presse quotidienne française, historiquement sous-capitalisée, France-Soir est mort pour n’avoir jamais eu à sa tête un industriel suffisamment investi pour accompagner les mutations de ce métier. A l’inverse de l’Angleterre, de l’Allemagne, voire de l’Espagne ou de l’Italie, où la presse quotidienne, adossée à des groupes solides, reste encore puissante, la presse quotidienne française, a toujours été patrimoniale et sous-financée: peu ou pas d’investisseurs puissants, mais une succession de grandes familles et de mécènes, aux moyens limités. Pierre Lazareff pu compter sur l’empire Boussac: ce dernier restera le seul vrai industriel que connut la presse française d’après-guerre et Robert Hersant ne dut sa longue carrière qu’au concours de banques qui finirent par l’abandonner. Jusqu’au carambolage

On est ainsi bien loin, en France, des Murdoch, des Prisa, des Bertelsmann, des Rizzoli ou des Agnelli, ces puissances qui bien qu’ayant pris de plein fouet la concurrence d’Internet, ont su doter leurs entreprises de presse de moyens suffisants, afin qu’elles s’adaptent à ces évolutions. Il n’est de voir les journaux du week-end  de l’autre coté de la Manche, du Rhin, des Alpes ou des Pyrénées: D’El Païs, à Madrid à la Vanguardia de Barcelone, en passant par le Daily Telegraph de Londres ou le Frankfurter Allgemeine, en Allemagne, ces quelques titres, par leur densité et leur pagination, offrent le visage d’une presse quotidienne puissante et adossée à des sites Internet non moins solides.

Il n’y a donc pas dans la mort de France-Soir une quelconque fatalité. C’est simplement la conséquence du lent délabrement d’une industrie envoyée à la casse par des amateurs peu éclairés, plus soucieux de s’offrir un hobby que de participer, avec enthousiasme et ambition, au développement de leurs journaux. Et il est presque insultant pour le petit cercle de rescapés de cette aventure de presse de leur faire avaler la pilule, en leur disant que la vie continue. Et que leur journal entame aujourd’hui une seconde histoire sur Internet. Quand le web devient un cimetière pour les titres qu’on y exile. 

 

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8 Comments
  • John Do
    décembre 15, 2011

    Evidemment qu’Internet met en péril tous les journaux. Nous sommes de plus en plus connectés d’un peu partout et tout le temps. Quel intérêt d’acheter un journal pour relire les informations que nous avons déjà lu en temps réel ou presque ? Même la télévision est en retard. Il suffit de regarder le 20 h 00 ou le 19 h 45 pour s’en apercevoir. On a parfois l’impression que l’info date de deux jours. Le problème est le modèle économique des journaux en ligne. Il n’y en a pas. Personne ne veut payer.

    Vous écrivez : On est ainsi bien loin, en France, des Murdoch, des Prisa, des Bertelsmann, des Rizzoli ou des Agnelli, ces puissances qui bien qu’ayant pris de plein fouet la concurrence d’Internet, ont su doter leurs entreprises de presse de moyens suffisants, afin qu’elles s’adaptent à ces évolutions.

    S’adapter à quoi ? A perdre de l’argent ?

  • berdepas
    décembre 15, 2011

    Les journaux qui sombrent sont ceux qui ont peut-être de mauvais armateurs, ou de mauvais capitaines, mais aussi un médiocre équipage.
    La Presse écrite, à de rares exceptions près, a sombré dans la médiocrité, entrainée dans les profondeurs par de médiocres journaleux.
    Superficialité des articles, opinions « pré-formatées », manque d’analyses sérieuses sur les grandes questions de notre époque, trop de « people » de politique spectacle de papiers consacrés à des « petites phrases » etc…
    Que sont, les Lazareff, les Camus, les Mauriac, les Kessel, les Desgraupes, les Dumayet etc… devenus ????

  • John Do
    décembre 15, 2011

    J’ajouterai que tant que les journaux en ligne ne seront pas payants ils seront en danger. Imaginons simplement 1 euro par mois multiplié par le nombre de visiteur unique mensuel. Mais voilà, c’est compliqué de payer sur le net, un coup c’est sécurisé, le lendemain c’est piraté. Et puis payer quoi ? Soit ça copie-colle de partout, soit les journaux sont devenus militant, soit les deux. Trouver un article de fond, impartial, objectif, qui permette de se forger une idée relève de l’impossible. On ne parle même pas de l’orthographe, c’est inutile.

  • Séraphin Lampion
    décembre 15, 2011

    Après que gouverne l’indicatif.

  • Ruquier
    décembre 15, 2011

    A vous lire on croirait que le journalisme ne peut exister que dans un journal imprimé. Allez en parler aux journalistes de Rue 89 ou Mediapart. Internet n’est pas un cimetière pour la presse mais son avenir. Certes des erreurs ont été commises chez France Soir. Certes la sous capitalisation a une responsabilité dans le naufrage des quotidiens papier, mais il y a un mouvement en marche depuis fort longtemps (bien avant l’arrivée d’Internet), qui dépasse ces problématiques. C’est tout simplement que pour l’actualité chaude, les médias instantanés (tv, radio et depuis 10 ans Internet) ont pris le dessus. De plus ils sont tous gratuits. Lisez les enquêtes de Denis Muzet sur ce qu’il appelle la malinfo et vous verrez que le phénomène est sociétal, profond, et qu’il vient de loin. Dans notre société on veut être au courant de tout et tout de suite, mais on n’a que faire d’en savoir plus. D’où le succès de France Info, des JT et d’Internet. C’est cela qui tue à petit feu la presse quotidienne papier et payante.
    Il faudra néanmoins toujours faire de l’info quel que soit le support et il y aura des Mediapart, des Slate, des Rue89… Allez voir le formidable site de francetvi qui bouscule l’info sur les supports numériques. C’est de l’innovation, cela va de l’avant. A votre avis pourquoi Les Echos misent sur le numérique pour envisager leur avenir ?
    Quant aux journaux étrangers, ils bénéficient effectivement d’un socle plus solide, de traditions de lecture plus ancrées, de parti pris éditoriaux qui rencontrent le public. Mais ils n’échapperons pas à l’inéluctable : une mutation vers de nouvelles formes de diffusion de l’information.
    Oui France Soir aurait peut-être pu s’engager depuis longtemps sur un mix papier/Internet mais il ne l’a pas fait, je suis d’accord que de ce point de vue, c’est un gâchis.

    • langoet
      décembre 23, 2011

      @Ruquier, Perdriel (Nouvel Obs, ex- proprio du Matin de Paris) vient de racheter Rue89. Donc presse/papier encore utile non ?
      @Revel, bien senti votre papier, mais à l’époque pour lire Libé (« jeune-vieille formule) et le Matin régulièrement, c’est Libé qui décoiffait et Le Matin qui s' »embourgeoisait »…

  • Martino
    décembre 15, 2011

    Il faut surtout se souvenir qu’une certaine Valérie LECASBLE (épouse du médiocre Airy Routier) a plombé FRANCE SOIR juste avant de faire la même chose avec i-Télé.

    En ponctionnant un salaire faramineux en regard à ses compétences éditoriales, stratégiques, marketing et techniques, V. Lecasble a une considérable responsabilité dans l’échec du quotidien et les faibles scores d’audience de la chaîne d’information de Canal+, face à la petite BFM TV.

    Mais encore une fois, personne dans les médias n’osera laver ce linge sale publiquement…

  • RABILLOUD Jean-François
    décembre 15, 2011

    Cher Renaud,
    Je crois que le Matin de Paris a été créé en 1977, pour les Municipales et que le groupe Boussac ne s’est jamais intérressé à France Soir, mais a été propriétaire de l’Aurore. Amicalement. JFR.