Les négociations de la Croix-Rouge internationale avec les autorités et les opposants syriens se sont achevées une nouvelle fois dimanche sans accord pour évacuer les blessés, dont la Française Edith Bouvier, bloqués à Homs, une ville toujours pilonnée par l’armée syrienne. Insupportable et inqualifiable, la situation de cette consœur retenue par les autorités syriennes a vu l’ensemble des médias écrits et audiovisuels se mobiliser et pilonner le régime de Bachar-el-Assad. Or cette mobilisation, outre le fait qu’elle a fini par braquer Damas et politiser l’affaire, semble avoir compliqué les négociations en cours, Edith Bouvier devenant l’enjeu d’un bras de fer entre Français et Syriens.
S’il n’est pas ici question de reprocher aux médias de se mobiliser fortement pour venir en aide à cette journaliste pigiste du Figaro, dont on souhaite ardemment le retour, on est en droit de s’interroger sur cette démarche qui voit une corporation toute entière se mettre en branle comme un seul homme, en actionnant tous les leviers dont elle dispose, afin de sauver l’une des leurs. Cet emballement médiatique, constitutif de la culture d’une profession qui n’abandonne pas les siens, a ainsi son revers et ses limites. Car la question qui se pose, en effet, et qui divise certaines rédactions, est celle-ci: au nom d’un esprit de corps, d’un corporatisme affiché, doit-on rameuter l’opinion et l’appareil d’Etat, par médias interposés, dès lors qu’il s’agit d’un confrère ou d’une consœur, quand croupissent au Mali ou ailleurs, en Afrique ou au Sahel, des otages oubliés?
Enlevés par l’organisation clandestine Al-Qaida au Maghreb Islamique, cette mouvance active au Sahel, cinq Européens, dont deux Français sont ainsi toujours détenus dans la quasi-indifférence de ces mêmes médias, dont on nous remémore l’existence à chaque communiqué de leurs ravisseurs : le 12 janvier dernier, AQMI menaçait ainsi d’exécuter les deux Français, (photo), si Paris et ses alliés tentaient une opération militaire pour les libérer ; l’occasion d’une simple et brève insertion au cœur des JT. Puis, plus rien…
Il y a ainsi quelque chose d’éminemment dérangeant à voir des médias, – notamment audiovisuels-, déclencher l’artillerie lourde pour l’un des leurs, quand d’autres, sans liens aucuns avec le métier de journaliste, disparaissent dans les geôles de l’oubli. On voudrait voir journaux, radios et télés déployer les mêmes efforts, la même ferveur, pour ces sans-grades qui ont le plus souvent, pour seul handicap, de ne pas avoir de carte de presse. Et si le sort d’Edith Bouvier doit nous mobiliser, ceux de ces otages plus obscurs devraient voir ces mêmes médias déployer les mêmes louables efforts.
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février 27, 2012
Concernant les otages au Sahel, votre information est incomplète car vous n’avez pas parlé des 4 otages d’Areva et de Vinci enlevés à Arlit le 16 septembre 2010 et qui sont toujours retenus par Aqmi. En effet, les otages du Sahel sont au nombre de 9 à ce jour : 4 Français enlevés en septembre 2010, 2 Français enlevés en novembre 2011 et 3 Européens.
février 28, 2012
Toute la question est là, Monsieur Revel.
Merci de le rappeler à nous, simple citoyen que nous sommes.