Une émission comme une verrue plantée sur le visage d’une bimbo siliconée, un Ovni débarqué au pays de Nabilla et des Anges et démons d’une téléréalité pathétiquement vide : Talk Club rassemble depuis quelques semaines sur NRJ 12 un plateau de jeunes confrontés à un patron dans le vent, ou à des personnalités branchouille, (Xavier Niel, Jacques-Antoine Granjon, Teddy Riner…)
Carré, propre et sans fioritures ce programme animé par Cyril Viguier, qui aurait sa place sur n’importe quelle chaine du service public, s’est donc posé là où ne l’attendait pas. Et c’est depuis, l’œillet à la boutonnière d’une chaine qui s’offre à moindre frais un peu d’image et d’honorabilité: Une lichette de sens au royaume de la vacuité.
Il est vrai que le CSA, cette Ligue de vertu du paysage télé, avait demandé à ses responsables que l’on repeigne un peu la façade de cette chaine de télévision, dont le QI place en comparaison celui d’une huitre au rang de celui d’un Nobel. Avec leur habituelle sens de la nuance, les sites spécialisés ont naturellement joué de la sarbacane en pointant du doigt les audiences moyennes de ce programme, quand l’audimat n’est pas le critère le mieux adapté pour juger de sa qualité.
Saluons donc NRJ 12 et louons donc cette initiative qui se veut une petite lueur de positivisme dans la grisaille ambiante: Xavier Niel sur ce plateau transformé en une tribune de Pôle Emploi aurait fait se lever des paralytiques le jour de son passage….
Cette petite chaine de la TNT aura surtout permis de démontrer à quel point le paysage médiatique, « Googleisé », « Yahooisé », a totalement succombé à la médiocratie environnante. Pas un média, pas une radio, pas une chaîne, d’info ou non, pas un bulletin, qui ne soit emparé du fait divers le plus insignifiant, le plus anecdotique, le plus intrinsèquement creux: J’ai nommé Nabilla.
Dix jours que ce banal fait-divers occupe la Une. Que l’histoire à deux balles de cette comète de la téléréalité, – dont on se fiche ! -, occupe mes confrères, lesquels nous informent, heure par heure, de l’évolution du dossier, « révélations » à l’appui. Dix jours qu’Internet multiplie les crises de tachycardie à la moindre confession de l’un ou l’autre des protagonistes d’une affaire qui aurait dû être reléguée dès la première heure.
« Breaking news ! » Petits et grands médias, – Match y compris-, tout le monde a embrayé comme un seul homme le nez sur les compteurs de «Pages vues ». Et ça marche.
A lui seul ce sujet résume les pertes de repères d’un métier qui a succombé à ce qu’il dénonçait il n’y a pas si longtemps encore: le diktat de l’immédiateté, la dé-hiérarchisation de l’info, son enrichissement ou apauvrissement uniquement sensoriel, bref ce caniveau où coule à jet continu la sensation, le choc. Qu’est-ce qui fait nouvelle ou pas ? L’idéologie d’une époque se définit par ce qu’elle s’accorde à tenir pour réel ou important à l’instant T, dans un lieu X . Alors Nabila, relayer ou non ? Telle est la question. Nous la sommes-nous posée?
novembre 21, 2014
Quand il y a eu la tragédie de la mort de Marie Trintignant, une multitude d’associations et de féministes ont récupéré ce terrible fait divers en exploitant la condition féminine alors qu’il s’agissait d’un ignoble crime passionnel.
Pourquoi n’entend-on plus ces mêmes donneurs de leçons dans le cas inverse ?
Et si c’était Nabilla qui avait été la victime ? Que se serait-il passé ?
Que les choses soient claires : le viol, la violence contre les femmes, les enfants ou les animaux sont intolérables. Ce qui est révoltant c’est la récupération d’un fait divers violent par les médias, les associations et les donneurs de leçons.