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Pythie du numérique, vestale digitale de France Télévisions, dont elle est la nouvelle pédégère, l’ex dirigeante d’Orange France, Delphine Ernotte, a-t-elle entendu des voix avant de rédiger son projet pour France Télés, baptisé Audace 2020 ? Dispose-t-elle de dons télépathiques ? Ou le hasard de ses réflexions et travaux préparatifs en vue de cette présidence l’aurait-elle amenée à croiser la pensée d’un autre candidat? Catalogue de grandes intentions, sa copie comporte en effet de troublantes similitudes avec celle d’un autre postulant, l’ancien patron de Lagardère Active, Didier Quillot : un dirigeant sèchement évincé par le CSA après que des moutures de son dossier aient maladroitement circulé dans Paris peu avant qu’il ne dépose une version achevée Tour Mirabeau. Stratégie, identité des chaines, gouvernance, premières décisions…La lecture comparée et attentive des deux projets en lice, – et mis en ligne à quelques jours d’intervalle-, laisse en tous les cas quelque peu songeur…

 

Jugeons-en :

 

Evoquant sa prise de fonction, D Quillot explique vouloir, «mettre en place le nouvel organigramme, strictement paritaire (…) » Ainsi qu’une « direction commerciale formée par le rapprochement de France Télévisions Distribution et France Télévisions Publicité »
Deux idées que partage D Ernotte, qui écrit : «Dès mon entrée, je nommerai une équipe strictement paritaire », ainsi qu’une «Direction commerciale qui aura la tutelle de France Télévisions Publicité, France Télévisions Distribution et Multimédia France Production ».

 

A propos des finances du groupe, D Quillot propose de « réaliser un audit de la situation financière 2015 pour préparer une révision du budget prévisionnel 2015 »

Ce que partage D Ernotte, qui écrit: « Dès mon entrée en fonction, je procéderai à l’élaboration d’un budget rectificatif 2015 ».

 

A propos des programmes :

Page 36 de son dossier, D Quillot écrit :
«France 2 doit s’affirmer comme la chaine de l’évènement, avec en particulier la conception de soirées événementielles, (…). Par exemple, The Voice, programme distractif et fédérateur, aurait parfaitement sa place sir France 2, (…) Ne plus fermer la porte aux formats étrangers en adaptation française, ex : The Voice sur la RTBF et la BBC, ou Danse avec les stars sur la BBC », (…), France 2 doit s’imposer comme la chaine du lien entre les générations. Pour cela, elle s’attachera à développer sa dimension « participative » ( social TV»

 

D Ernotte, pour sa part, signe des deux mains en page 16 de sa copie :
« Le direct évènementiel ( …) constitue le pivot du rassemblement mixe et intergénérationnel,(…), D’une certaine façon, avec Danse avec les stars pu The Voice, la chaine privée TF1 réussit à capter, dans sa première partie le samedi, un public non seulement nombreux, mais sensiblement plus jeune que la moyenne (…) l’objectif est de créer les conditions de l’échange et de de la discussion (…) d’une forte présence sur les réseaux sociaux » (…).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Passons à France 3 où nos deux tourtereaux ont une complicité touchante :
Didier Quillot jette page 38 que « le management de la chaine France 3 sera également celui de France 3 Régions : Une direction commune France 3 et réseau France3 Régions sera créée»
Même proposition pour sa voisine qui écrit page 17 : «Pour rendre sa cohérence et une ambition à France 3, je commencerai pa rétablir une unité de commandement entre National et Régions ».

«La tourner résolument vers l’information », ajoute Didier Quillot. Ce que propose à son tour Delphine Ernotte, qui estime que « la reconnaissance de son travail sur l’information et notamment celui de France 3 Régions doit être pris comme une valeur ajoutée ».
« Cette refondation devra s’accompagner d’une réforme de son organisation en régions pour la rendre conforme à la réforme territoriale de notre pays », souligne le premier. Quand la seconde estime que « la nouvelle carte des régions offre une opportunité forte de redéfinir la structure de la chaine ».

 

France 4 n’est pa en reste, qui voit la pensée de D Ernotte chevaucher celle de D Quillot. Ou inversement.

 

« France 4 (…) la chaine de la jeunesse, de l’éducation et de la famille, clairement identifiable par les parents et les enfants » écrit ce dernier, quand la première annonce: « France 4 doit devenir la référence pour la jeunesse, (…) Il s’agit d’offrir aux parents l’assurance d’une chaine accessible à toute heure de la journée aux enfants ».
« Les cases jeunesse matinales de France 3 seront transférées sur France 4 », écrit Quillot. Quand de son côté Ernotte énonce : « C’est sur cette chaine que doivent être rapatriés les programmes proposés sur d’autre chaines du bouquet, notamment la matinale d’animation de France 3″.(…)

Autre proposition du même Quillot, page 41 : « La création d’un JT pour les enfants quotidien, incarné » Ce qu’Ernotte épouse de son côté en évoquant, « Un rendez-vous quotidien pour traiter de l’actualité sous un angle adapté à la jeunesse (…)
France 5 n’échappe pas à ce phénomène mimétique qui voit ces deux projets s’épouser.

(…) « France 5 créera sur sa grille une case de fiction originale en première partie de soirée », annonce D Quillot, quand D Ernotte écrit : « La fiction doit pouvoir trouver sa place à l’antenne (…) Cela serait une manière pour la chaine de mieux exploiter sa première partie de soirée». « Reconnue pour son identité », pour la seconde, France 5 « est la chaine de France Télévisions qui bénéficie de la meilleure image, de la plus grande cohérence de son positionnement » (…)

Que dire enfin de cet autre et dernier point qui voit l’ex candidat déchu énoncer «La création d’un comité éditoriale diversité rattaché directement à la direction générale (…) » Une proposition également présente sous la plume de Delphine Ernotte, qui évoque « la création d’un comité pour la diversité des programmes auprès de la présidence de France Télévisions».

 

 

 

Nous nous garderons bien de tirer la moindre conclusion à la lecture, non exhaustive, de ce qui constitue ici qu’une suite de hasards forcément fortuits. Didier Quillot et Delphine Ernotte ne sont les seuls, parmi la trentaine de candidats en lice, à avoir exploré les mêmes pistes, abordé les mêmes thèmes, investigué les mêmes problématiques. Que la copie de Didier Quillot ait circulé est une chose regrettable. Mais qu’elle ait atterri sur les bureaux de tel ou tel autre postulant à la présidence de France Télévisions est naturellement impossible. Ce serait en effet jeter le discrédit sur cette grande famille du Paf, dont l’éthique, épinglée à sa boutonnière, ne peut être naturellement mise en cause. Mais que le hasard est coquin…

Mise en piste très tôt pour enlever cette présidence, Delphine Ernotte avait terrain bien dégagé avant de se lancer dans cette bataille aux règles biseautées. Installée à la tête de France Télévisions pour cinq ans, il lui reste à faire la preuve que sa nomination n’est pas seulement le fruit d’une construction habile, qui a vu un parterre de candidats se faire canarder avant même d’avoir pu avancer une idée ou un projet, mais le fruit d’un long travail. La tonalité de la presse, exception faite du Figaro, quant à la procédure du CSA et aux conditions qui ont conduit à cette désignation, reste très, très, très, critique. 

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