Et si l’émission, cousue-main, de François Hollande de France 2, programmée jeudi, virait à la Bérézina? Et si Delphine Ernotte, qui doit essuyer un feu nourri, n’avait pas d’autre choix que de se séparer de son directeur de l’information, Michel Field, sous peine de voir le brasier se propager à tous les étages de la maison qu’elle préside? L’Elysée, qui observe depuis quelques jours avec atterrement ce qui se passe de l’autre côté de la Seine, n’a pas de mots assez durs pour qualifier la pagaille qui entoure la préparation de l’émission qui devait permettre au chef de l’Etat de reprendre partiellement la main. Car il y a de fortes chances pour que les journalistes de France Télévisions profitent de ce rendez-vous pour dégoupiller une motion de défiance du plus mauvais effet. Pour qu’ils ciblent un Michel Field d’une infinie maladresse et dont la position, fragilisée à l’extrême, devient tout simplement intenable.
Une chose est acquise : les journalistes de France 2 vont exiger le retour au bercail de la production du nouveau rendez-vous politique de la chaine confié à Karim Rissouli : une production que Michel Field a décidé d’externaliser en la confiant à l’ex-producteur du Grand Journal, Renaud Le Van Kim. Inacceptable pour les journalistes d’un groupe pachyderme dont l’outil de production est sacrifié au profit d’un secteur privé cajolé.
Murée dans un silence qui devient pour le moins assourdissant, (au même titre que celui du CSA qui l’a nommé et où l’on fait l’autruche), Delphine Ernotte se retrouve confrontée à la première véritable crise de son jeune mandat. Or celle qui espérait profiter de la création d’une chaine d’information flambante neuve, maladroitement baptisée « France Info », pour asseoir sa légitimité, se retrouve prise au piège. Pire, c’est tout l’édifice de son projet caché qui prend doucement l’eau: celui de la création d’un audiovisuel publique, (radios et télés) rassemblé sous la seule bannière de France Télévisions et dont « France Info » devait être la préfiguration.
D’une fidélité canine jusqu’ici, l’entourage proche de la PDG commence à douter d’une stratégie pour le moins osée. Il n’est de voir l’incendie que déclencha le PDG de Radio-France, Mathieu Gallet, qui faillit sauter comme un bouchon de champagne en imaginant pouvoir délocaliser d’un claquement de doigt les deux orchestres de sa maison, avant que les syndicats ne le contraignent à reculer! C’est le vent du boulet qui ramena notre homme à la raison.
Qu’en sera-t-il pour Delphine Ernotte si elle persistait à vouloir tenir bride courte une population de journalistes sur le qui-vive guerrier? Michel Field saura-t-il apaiser des rédactions chauffées à blanc et au bord de l’implosion? Il y a fort à craindre qu’un Rubicond ait été franchi. Et que la crise ne s’installe.
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