Masse salariale, visées budgétaires, frais divers, stratégie des chaînes…Dans un rapport au vitriol, la Cour des comptes passe au crible la gestion de France Télévisions sur la période 2012-2015, laquelle porte pour l’essentiel sur la gouvernance de Rémy Pflimlin. Si le document, d’une grande sévérité, pointe du doigt l’inertie d’un PDG qui n’aura pas modernisé une entreprise anémiée et très en retard, notamment si on la compare à ses voisins européens, (principalement britanniques, belges ou allemands) il met en exergue la situation spécifique et quelque peu ubuesque de France 3. Les magistrats de la rue Cambon plaident ainsi pour un schéma, maintes fois évoqué au CSA et par un grand nombre de candidats en lice à la succession de Rémy Pflimlin, à l’été 2015: l’alignement de cette chaîne, grande dévoreuse de subsides et d’effectifs, sur la nouvelle carte des régions, redessinée à l’occasion de la réforme territoriale de François Hollande.
L’idée n’est pas neuve et on sait de longue date maintenant qu’elle aurait le mérite de reformater une entreprise aux allures de pachyderme: une maison dont les coûts et les effectifs doivent être repensés à l’aune de ce redécoupage géographique. Des centres régionaux moins nombreux et plus compacts, un parc immobilier forcément revu à la baisse, des effectifs retaillés en fonction de leurs positionnements cartographiques, une redéfinition de ce que doit être une télévision de pays, à l’heure d’internet et des nouvelles technologies: autant de questions centrales, mais laissées ostensiblement en jachères.
Les responsables de cette inertie, de ce grand gâchis, sont au nombre de trois. L’état d’abord. Soucieux de préserver la paix sociale au sein d’une maison regardée de tout temps comme une poudrière, les responsables politiques ont refermé le couvercle. Indécision, manque de courage politique, absence d’ambition: ni Nicolas Sarkozy, ni François Hollande, n’ont voulu oser l’évidence. Résultat : une entreprise laissée en déshérence. Le deuxième responsable est naturellement le CSA. On s’étonne du silence, de l’absence, d’une institution que la Cour des comptes semble rappeler à l’ordre. Il faut attendre la publication d’un tel rapport pour que se vérifie ce que chacun savait ou subodorait. Et que les membres du CSA, dont c’est la fonction, auraient dû relever et dénoncer: à savoir, le délitement d’une entreprise laissée à l’abandon. Troisième coupable, la présidence de France Télévisions qui, faute de feuille de route, navigue à vue. Qu’il s’agisse de Rémy Pflimlin hier ou de Delphine Ernotte, aujourd’hui. A la décharge de ces deux PDG, allègrement chargés (et presque injustement) par les auteurs de ce rapport : l’absence d’un cap. L’état, ici encore, se garde bien d’initier des réformes structurelles de fond, qu’il redoute par frilosité, quand de l’autre côté de la Manche, la BBC engage en ce moment même et avec le soutien de ses tutelles, un nouveau plan de restauration de 2000 personnes, le tout sur fond de profonde transformation digitale: le cinquième en vingt ans. Cette mutation permet aujourd’hui à la BBC d’être à la pointe des groupes audiovisuels mondiaux. Quand France Télévisions se cherche toujours un dessein.
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