C’est un joute inédite, par l’importance des enjeux et la personnalité des journalistes et animateurs sur la brèche, que nous proposent les chaines en cette rentrée 2017. Carrefour d’audience (et commercial) stratégique pour les chaînes, l’Access (l’avant-soirée) voit en effet s’affronter, à partir de ce soir, à la même heure, Yves Calvi (Canal+), Yann Barthès (TMC), Anne-Elisabeth Lemoine (France 5) et Cyril Hanouna (C8). Revue des forces en présence.
Yves Calvi.
Yves Calvi s’installe à la tête d’une émission sommée pour ainsi dire de relancer l’Access de Canal+. Un enjeu de taille pour le matinalier de RTL et de C’dans l’air, sur France 5, qui doit faire oublier l’accident industriel du Grand Journal. Lancée en 2004, l’émission-phare de Canal+ était tombée à ses plus bas niveaux historiques, à l’hiver 2016, (0,6% de part de marché et 115.000 téléspectateurs en moyenne), avant de disparaître corps et bien le 17 mars 2017. Produite par Jérôme Bellay et fabriquée en grand secret, avec d’importants moyens, L’Info du Vrai – titre du nouveau rendez-vous- se veut une session d’information et de décryptages, en clair et en direct, autour de questions et d’enjeux tant économiques et politiques que sociétaux. Programmé chaque soir de18h45 à 21 heures, ce rendez-vous, très attendu par les dirigeants de Canal+, sera par ailleurs rediffusé chaque jour sur CNews, en deuxième partie de soirée.
Force.
Indiscutablement, l’expérience, la crédibilité et la personnalité d’Yves Calvi. Celui qui a fait le succès de C’à vous semble parfaitement à sa place à la tête d’une émission façonnée en coulisses par une armada: le «team Bellay ». L’homme à qui « Canal » a offert un chèque en blanc dispose de tous les atouts, financiers, techniques et éditoriaux, pour s’imposer.
Faiblesse
Le risque ? Qu’Yves Calvi peine à incarner ce que l’on a longtemps appelé « L’esprit Canal», avec sa dose d’impertinence, d’inattendu et de légèreté. Son style académique, un brin austère, peut apparaitre comme un handicap à l’heure où les téléspectateurs privilégient en masse « l’infotainment » : l’infodivertissement.
Yann Barthès
L’ancien animateur du Petit Journal de Canal+ revient pour une deuxième saison aux commandes de Quotidien, sur TMC : l’un des très rares exemples d’une performance égalée pour un animateur passé d’une chaîne à une autre. Véritable « blockbuster » de la TNT, cette émission a enregistré des audiences record la saison écoulée (d’une moyenne de 6% à 7% de part de marché, à 1,5 millions de fidèles). Ce qui lui a permis de devancer à de nombreuses reprises, le programme
de Cyril Hanouna, sur TPMP, Touches pas à mon poste. L’animateur que l’on retrouvera entouré, peu ou prou, de la même équipe de journalistes et de chroniqueurs, (Hugo Clément, Vincent Dedienne, Eric et Quentin ou encore, Martin Weil et Panayotis Pascot) dispose avec Laurent Bon de l’un des producteurs les plus solides de la place. Et du complet soutien de Gilles Pélisson, patron de TF1, qui s’est engagé à laisser à Yann Barthès et son équipe une entière liberté de ton et d’expression. Vérifiée jusqu’ici.
Force
Un concept longuement rodé sur Canal+, que Yann Barthès et son producteur ont eu l’intelligence de transposer à l’identique sur TMC. Passé maitre dans l’art de la satire journalistique, du décryptage des coulisses de la politique et du reportage décalé, Quotidien n’a pas son équivalent dans le Paf.
Faiblesse
Le risque d’une usure du programme, qui date maintenant de 2004. Et des partis pris éditoriaux qui marquent ce programme et suscitent souvent des controverses sur les réseaux sociaux et dans la classe politique, où Quotidien agace.
Anne-Elisabeth Lemoine
Le changement dans la continuité. En confiant à Anne-Elisabeth Lemoine les clés du loft d’Anne-Sophie Lapix, (un temps promises cet été à Stéphane Bern, dont le nom fut évoqué) France 5 a finalement fait le choix de ne pas bousculer une émission aux performances flatteuses. Avec une pointe à 1,3 millions de téléspectateurs (à 6,9% de part de marché) en mars 2017, C à vous, lancé en 2009, a trouvé mieux qu’un rythme de croisière. A noter quelques changements en cette rentrée: si Patrick Cohen, Pierre Lescure et Maxime Switeck conservent leurs sièges autour de la table de ce « talk » , trois nouveaux visages apparaissent. Il s’agit des journalistes de BeINSport, d’Europe 1 et du Monde, Anne-Laure Bonnet, Marion Ruggiéri et Samuel Laurent.
Force
Longtemps joker d’Anne-Sophie, Anne-Elisabeth Lemoine connait sa partition et les ressorts d’une émission à la recette inchangée. France 5, qui a longuement hésité, fait le pari de la stabilité avec un visage clairement identifié par les téléspectateurs.
Faiblesse
Une personnalité plus effacée et sans doute moins lumineuse qu’Anne-Sophie Lapix. D’où les hésitations de la chaîne. Les 800 000 téléspectateurs de moyenne recensés depuis la reprise du programme, il y a une semaine, sont à relativiser: C à vous était seul sur son créneau. Ce lundi, l’environnement va radicalement changer.
Cyril Hanouna
Une rentrée épiée car à hauts risques pour le bateleur de TPMP de C8 qui sort d’une année chahutée, avec des polémiques à l’origine de lourdes sanctions de la part du CSA. Cyril Hanouna, dont la saison écoulée a laissé des traces dans les étages dirigeants du groupe Canal+ et de Vivendi, a pour obligation d’assagir et de recentrer son programme. Ce à quoi il s’est attelé tout l’été en coulisses. Reste qu’avec 1,44 million de téléspectateurs en moyenne, Touches pas à mon poste s’est positionné comme le premier talk-show d’avant soirée de France, devant Quotidien. Tiendra-t-il cette même cadence cette saison ? L’animateur, qui dit viser la barre des 2 millions de fidèles, joue gros en cette rentrée. D’autant qu’il a pour premier mission et objectif, fixé par la chaîne, de faire revenir les quelques gros annonceurs qui l’ont sanctionné, en désertant le programme.
Force
Une indéniable énergie et capacité de rebondissement. Cyril Hanouna est avec Jean-Luc Delarue et Christophe Dechavanne de ces animateurs patrons de PME capables de tenir deux heures de direct sans faiblir. Ajoutez à cela, côté audience, un solide matelas d’aficionados invétérés.
Faiblesse
Une personnalité imprévisible capable de déraper pour un bon mot. Un tempérament de feu-follet en permanence sur le fil du rasoir. Ce sont là les dangers qui guettent ce roi de « l’impro ». L’homme peine à se domestiquer.
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