Par une lettre recommandée en date du 13 juin dernier, la directrice adjointe des Magazines de France Télévisions, Hélène Risacher, a été licenciée, déclenchant une levée de bouclier au sein d’une entreprise qui l’employait depuis 2011. L’ensemble des syndicats de journalistes, toutes étiquettes confondues, se sont en effet élevés à la suite d’une décision pour le moins incomprise.
Et pour cause: il est reproché à cette cadre de l’information de s’être opposée, lors du Comité de direction du 14 novembre 2017, aux arbitrages budgétaires décidés : des critiques et une posture inacceptables aux yeux de sa hiérarchie.
Dans le courrier qui lui a été adressé à la mi-juin on peut en effet lire : « Vous ne parvenez pas à faire la part des choses, ce qui s’est traduit depuis et au quotidien par des manifestations de votre manque d’adhésion aux décisions, éditoriales ou budgétaire, de la Direction (…) Nous ne pouvons donc, a fortiori dans le contexte que connaît l’entreprise et au regard de l’importance des défis qu’elle doit relever, laisser perdurer cette situation de laquelle il ressort que vous n’êtes pas en mesure de témoigner d’une capacité suffisante pour répondre et vous adapter aux enjeux de l’organisation et aux attentes de votre hiérarchie (…) Nous devons donc en tirer les conséquences. Tels sont donc les motifs de votre licenciement »
Il est donc reproché à cette journaliste d’avoir exprimé, à haute voix, ses plus vives réserves à l’égard d’un train d’économies dont beaucoup estiment à France Télévisions, au sein des rédactions, qu’il met en danger la qualité de l‘information. Question : Est-ce une faute professionnelle que de pointer du doigt ce qui apparaît aux yeux de beaucoup à France Télévisions comme une réduction de la voilure dangereuse pour la qualité des journaux et magazines, sur France 2 comme sur France 3 ? Et cette journaliste paye-t-elle le simple fait d’avoir exprimé tout haut des inquiétudes partagées par un grand nombre de journalistes de ce groupe?
Dans son courrier de licenciement la DRH de France Télés évoque « la nécessaire cohésion au sein des équipes de direction » et elle stigmatise des critiques qui « ne sont pas acceptables de la part d’un cadre de votre niveau et de votre expérience qui occupe un positionnement stratégique »
Hélène Risacher en appelle aujourd’hui au CSA, par une lettre qu’elle a adressée, en date du 31 août dernier, à son président, Olivier Schrameck. Dans cet autre courrier la journaliste écrit: «Mon propos n’est évidemment pas d’évoquer auprès de vous la légitimité de ce licenciement qui relève de la compétence des prud’hommes et non du CSA. Néanmoins, le motif même de ce licenciement me semblant traduire un dysfonctionnement extrêmement grave de France Télévisions, il m’apparaît légitime, de vous saisir de cette affaire. En effet, dans le cadre de l’article 47-5 de la loi du 30 septembre 1986, vous disposez du pouvoir de retirer le mandat du président de France Télévisions, ce qui vous octroie, de fait, un contrôle des mandatures accordées par votre conseil. Or, il s’avère que France Télévisions est devenu, sous la présidence de Madame Delphine note, la seule entreprise de France procédant à des licenciements de son personnel d’encadrement pour abus de liberté d’expression : en l’occurrence, avoir courtoisement tenté, au cours d’une réunion d’encadrement, de défendre ses équipes (…) »
Et d’ajouter : «Comme les instances syndicales et représentatives du personnel l’ont unanimement relevé, il s’agit de savoir s’il est acceptable qu’au sein de l’entreprise comme France Télévisions, l’expression de toute analyse divergente par son personnel soit sanctionnée par un licenciement. L’effet direct de cette situation au sein de France Télévisions est d’imposer, par la terreur, le silence de tous et d’obtenir du personnel d’encadrement l’approbation inconditionnelle à toute mesure de la direction sauf à risquer d’être immédiatement licenciée (…) Pardonnez-moi la franchise de ma question, mais il s’agit aujourd’hui de savoir si le CSA, informé de telles pratiques, les accepte ? »
Ce courrier restera-t-il lettre morte ? Ou le CSA décidera-t-il d’examiner une affaire qui fait débat en interne à France Télévisions, où le « cas Risacher » suscite incompréhension et colère ?
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octobre 5, 2018
Bonjour,
Depuis son élection à la Présidence de France Télévisions, madame Delphine Hernotte fait régner un climat de terreur auprès des personnels, surtout journalistes et producteurs d’information. Nombre d’éminent intellectuels, également, privés d’antenne au regard de leur opposition et (ou) critique de l’Etat.
Liberté d’expression baillonée, Emission supprimée, animateurs licenciés.
J’ai vécu cela de l’intérieur jusqu’en 2017 où, par dépit, j’ai quitté France3 et pris ma retraite. Management brutal d’encadrement étant eux-mêmes sous pression des directeurs régionaux, eux mêmes menacés par la direction générale et le siège parisien et de la Présidence, haut de la pyramide. Nombreux sont les burn out et les arrêts maladie au long cours qui se multiplient et sont de plus en plus long…
Il est dommage que cette vénérable entreprise publique perd de plus en plus son devoir d’information auprès du public.