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 Il ne faut pas se moquer des bons sentiments. Le désir de faire chuter les murs, d’être tous ensemble pour un plus belle la vie tout de suite est une force bénéfique. Je ne vous parle pas des images de liesse populaire et joyeuses retrouvailles est-ouest que les commémorations de la chute du Mur de Berlin ont fait déferler sur nos écrans. Ni du plaisir manifeste des Brivois de voir réunis ensemble, à l’occasion de la Foire du Livre, Jacques Chirac et François Hollande, sympas, souriants, blaguant entre eux, que des bonnes manières.

Non, je pense à l’émission « Tous ensemble », (photo), le samedi, sur TF1, 17H50. J’ai étouffé un sanglot quand Myriam et ses deux enfants ont découvert, extasiés, la maison pimpante neuve que leur avait construite en une semaine jours et nuits une armée de volontaires au grand cœur, proches, voisins, artisans, commerçants du coin. Je suis fleur bleue, naïf ? Et alors, ça ne fait de mal à personne, et même ça fait du bien. L’émotion solidaire des gens qui ont aidé Myriam à reprendre goût à la vie, était vraie. Et je suis convaincu qu’étaient réelles les larmes de l’animateur Marc Emmanuel qui « craque » quand le directeur d’un magasin d’ameublement, l’air pourtant coincé comme deux barreaux de chaise, fait cadeau de deux lits.

Je pense aussi au nouveau jeu de TF1, «Le plus grand quizz de France ». Aux  milliers de candidats enfiévrés que Christophe Dechavanne, Jean-Pierre Foucault et Alexia de la Roche-Joubert, dans le rôle de lutins recruteurs examinateurs, sont allés dégoter aux quatre coins de la France. Pour cette phase éliminatoire, il s’agissait de répondre à dix questions. Le grand gagnant empochera 250.000 euros. Tous en rêvent, ont envie de se mettre à l’épreuve; révisent comme des fous les quinze mille questions, tous ensemble, le flic, le sapeur pompier, le secouriste, le prof, l’ambulancière, le trayeur de vaches, la bimbo, le retraité autodidacte, mais aussi le noir, l’arabe, le gay, le jeune, le vieux, la grosse, la maigre, le rocker, le classique.…

 L’idée d’appliquer tous les codes de la télé réalité (version Star Ac) à un jeu de connaissances est géniale. Ah cet art de suivre un candidat depuis chez lui, à en dresser un portrait rapproché, à installer le suspense, passera, passera pas ? Evidemment, pour apprécier, il faut aimer le jeu, la compétition, les gens, la vie

Je pense enfin à Plus Belle La Vie.Vous savez quel a été le prénom le plus donné l’année dernière? Nathan. Un des jeunes héros du feuilleton de France 3. Je comprends la fierté professionnelle qu’éprouve Hubert Besson, directeur de Telfrance série. Elle n’est pas seulement d’avoir rassemblé prés de six millions d’addicts (dont je suis) à 20H10. La brochure destinée aux publicitaires met en avant le « concept de la série » et les « valeurs »  qu’elle communique : mixité sociale, solidarité et générosité, convivialité et chaleur humaine, brassage culturel, esprit de famille et dialogue entre génération, proximité, ancrage dans le réel, modernité.
Tous les soirs, Thomas le barman et son ami le juge, Abdel, le fils du dealer en prison, Céline qui sort d’une aventure avec une femme et cherche désespérément avoir un enfant, Wanda, la grand-mère délurée, habituent le public à passer outre les préjugés Chaque épisode s’articule sur trois histoires. La Production les appelle… des « arches » !

L’une, en cours, met en scène un mystérieux groupe, le Clash, des révolutionnaires prêts à faire couler du sang impur. Si on revient à la réalité, inutile de se demander ce que pensent de mes émissions adorées les durs de l’ultra gauche. Le « Rebond » dans Libération d’Eric Hazan, fondateur des éditions La Fabrique, est réfrigérant. Titre : « Un an après Tarnac, le temps de la révolte ». Je lis que « face au mensonge officiel », « nous avons fait appel au vieux fonds humaniste-démocratique de la gauche. Dans l’inquiétude où nous étions sur le sort de nos amis emprisonnés, nous avons eu spontanément recours à cet arsenal usé mais rassurant, le mieux fait pour réunir des voix, des sympathies, des signatures ». En voilà un qu’on ne prendra jamais par les bons sentiments. 
Philippe Gavi