Le sourire vorace, le regard laser et une forme de détermination dans l’expression qui force l’admiration ou l’agacement, selon que l’on appartienne ou non au clan de ses aficionados: Elise Lucet fait cette semaine la Une des InRocks. Après Karim Benzema, Bertrand Cantat, Alain Juppé ou encore Catherine Deneuve, Scarlett Johanson et Léa Salamé. Voilà notre pasionaria de l’investigation sacralisée en Une d’un magazine qui la campe en Diane chasseresse de l’info, la carte de presse en sautoir et son métier chevillé à l’âme, qu’elle exerce de manière débridée: sans retenue, règles ou limites.
Elise Lucet est aujourd’hui le caillou dans la chaussure de Delphine Ernotte et une grenade dégoupillér : une icône intouchable qui a fait de son magazine Cash investigation un bastion inexpugnable, du haut des remparts desquels elle arrose sa présidente, la menaçant de mettre le feu à sa maison et d’en faire du menu bois, si l’on se risquait à toucher à une parcelle de son sanctuaire: cette émission érigée de manière grotesque en Mecque de l’investigation. Investigation : Un terme que s’est arrogée une aristocratie dans la profession et que l’on devrait bannir du lexique journalistique. Parce qu’il renvoie le reste de la profession à des scribouilleurs, quand l’enquête est l’essence même de ce métier, ce pour chaque détenteur d’une carte de presse.
C’est un cas inédit en France. Jamais journaliste n’avait fait une telle OPA sur un pan entier de l’information d’une chaîne de télévision, publique ou non. Droite dans ses bottes, Elise Lucet, qui pratique un journalisme d’inquisition aux relents populistes, jouit d’une impunité jamais vue, bousculant et piétinant les institutions comme les hommes (patrons et politiques) avec gourmandise et jubilation. Invitée d’émissions médias où l’on promène l’encensoir, sans retenue ni distance, l’intéressée nous dispense à longueur de semaines, et par médias interposés, un catéchisme où il n’est question que de rigueur journalistique et d’éthique: des vertus dont elle s’enveloppe du haut d’un tréteau imaginaire.
Tant d’humilité nous sidère. Et tout cela est bien évidemment insupportable. Car si l’on ne peut contester son culot et la pertinence de certains des sujets qu’elle aborde dans son émission, son écriture, ses effets de manche, son côté fort en gueule, ses altercations mises en scène, son mode de questionnement à l’emporte-pièce, cette recherche du « buzz », bref cette manière de faire, desservent tout simplement son propos.
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décembre 1, 2017
Bonjour Monsieur,
Je ne connaissais pas votre blog avant de voir un tweet vous citant. Merci, vous me faites encore plus aimer le travail d’Elise Lucet et de son équipe ! C’est parce qu’il existe des gens comme vous qu’on regarde avec attention ses émissions et son travail, parce qu’elle est la seule à poser les questions qui fachent droit dans les yeux quand d’autres (vous ?) servent la soupe tous les jours.
Au passage, dénoncer le buzz quand on retweet les 3/4 du temps des articles de jeanmarcmorandini ou ozap (qui a pour slogan même « Buzz et Actu TV »), c’est quand même fort de café, non ?